Annie Le Brun n'est pas une femme commode : née en 1942 à Rennes, elle rencontre André Breton et fréquente le dernier cercle de surréalistes. A la demande de Jean-Jacques Pauvert, elle préface les œuvres complètes de Sade. Auteur d'études sur Jarry et Roussel, et d'essais parmi lesquels : "Du trop de réalité" (2000), elle signe dans Le Monde daté du dimanche 11, une vibrante tribune : Victor Hugo maintenant ! , où, par-delà l'éloge, elle s'élève contre l'utilisation actuelle de l’œuvre : "D'abord parce que, comme lors de chaque campagne électorale, du fait de l'immensité de son œuvre et de son sens de la formule, le voici à nouveau pris en otage par les pourvoyeurs d'"éléments de langage". Mais aussi parce que, cette année, la célébration du cent cinquantième anniversaire de la publication des Misérables ne nous aura épargné aucune banalité ni erreurs de rigueur."
Plus loin, elle écrit : "Pour unanime qu'elle soit, l'actuelle célébration des Misérables ne change rien à l'affaire, quand chacun retaille Victor Hugo à sa mesure, comme si, cent cinquante ans après, il lui était encore reproché "lorsque tout le monde est petit" d'avoir "la manie de "faire grand"". Et bien sûr, sans qu'on se soucie d'échapper au travers qu'il déplorait par avance à propos des "vues partielles" qui "n'ont qu'une exactitude de petitesse (...). A qui n'interroge pas le tout, rien ne se révèle" (Proses philosophiques)."
Il faudrait tout citer, ce que je ne veux pas faire ici. Mettons l'accent seulement sur le refus du plat réalisme qu'Annie Le Brun voit partout à l’œuvre, en politique et dans les arts. La haine de l'utopie lui semble la pierre de touche de ce temps, à laquelle elle oppose la puissance poétique de Hugo, "cette prodigieuse capacité de refuser ce qui est pour se projeter dans ce qui n'est pas, ou mieux de miser, comme il le dira dans Le Promontoire du songe, sur " le monde qui est et qui n'est pas "."
Elle termine en vantant le courage de Hugo qui, après dix-neuf ans d'exil, n'hésite pas à prendre le risque d'accueillir des Communards en fuite. "Le secret de ce courage, Hugo ne cherchera qu'à le faire partager, en montrant, que "personne n'est hors du rêve" et que "nous sommes les aventuriers de notre idée". Autrement dit, en montrant comment le grand refus politique vient puiser au grand refus poétique. Car s'il affirme superbement que "l'irrésistible est au fond des révolutions", c'est qu'il aura été un des très rares à prouver que "comme on fait son rêve, on fait sa vie"."
Annie Le Brun a conçu l'exposition "Les arcs-en-ciel du noir : Victor Hugo" qui est également le titre de son livre à paraître bientôt (Gallimard, 140 p., 19 €). L'exposition se déroule du 15 mars au 19 août à la Maison de Victor Hugo à Paris.
Il faudrait tout citer, ce que je ne veux pas faire ici. Mettons l'accent seulement sur le refus du plat réalisme qu'Annie Le Brun voit partout à l’œuvre, en politique et dans les arts. La haine de l'utopie lui semble la pierre de touche de ce temps, à laquelle elle oppose la puissance poétique de Hugo, "cette prodigieuse capacité de refuser ce qui est pour se projeter dans ce qui n'est pas, ou mieux de miser, comme il le dira dans Le Promontoire du songe, sur " le monde qui est et qui n'est pas "."
Elle termine en vantant le courage de Hugo qui, après dix-neuf ans d'exil, n'hésite pas à prendre le risque d'accueillir des Communards en fuite. "Le secret de ce courage, Hugo ne cherchera qu'à le faire partager, en montrant, que "personne n'est hors du rêve" et que "nous sommes les aventuriers de notre idée". Autrement dit, en montrant comment le grand refus politique vient puiser au grand refus poétique. Car s'il affirme superbement que "l'irrésistible est au fond des révolutions", c'est qu'il aura été un des très rares à prouver que "comme on fait son rêve, on fait sa vie"."
Annie Le Brun a conçu l'exposition "Les arcs-en-ciel du noir : Victor Hugo" qui est également le titre de son livre à paraître bientôt (Gallimard, 140 p., 19 €). L'exposition se déroule du 15 mars au 19 août à la Maison de Victor Hugo à Paris.
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