En ce qui nous concerne, le XIXème siècle présente deux entrées sur Les Misérables, "Gavroche" et "Javert après Valjean".
Ce titre même me donne l'occasion de revenir sur cette curieuse proximité des patronymes. Javert et Valjean partagent en effet les mêmes consonnes J et V, inversées, comme en rotation autour du A. La poursuite est inscrite dans le corps des lettres, indice d'une mystérieuse solidarité entre le bagnard et le policier (lui-même fils d'un garde-chiourme, donc marqué dès l'origine par le régime carcéral). Une semblable rectitude morale les réunit, même si elle n'est pas de même nature (Valjean obéit à une morale transcendante, Javert à la Loi des hommes), ce qui les distingue fondamentalement de l'autre personnage principal, Thénardier, crapule intégrale.
Ce nom aurait été inspiré à Victor Hugo par Louis Jacques Thénard, son contemporain et chimiste renommé, qui était opposé à la réduction du temps de travail des enfants proposée par Hugo (10 heures au lieu de 16).
C'est d'ailleurs sous ce nom de Thénard que Thénardier, devenu négrier en Amérique, se présente à Marius en juin 1833, à la fin du roman.
Thénard, illustration de Gustave Brion |
"Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?
Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;
Ils vont de l'aube au soir, faire éternellement
Dans la même prison le même mouvement... »
(Melancholia, Les Contemplations)
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