vendredi 27 janvier 2012

Un premier amour

A peine en ligne, le blog de Bertrand Le Gendre, sur 1962, l'année prodigieuse, a déjà disparu (voir billet précédent). Tant pis (je suis quand même un peu déçu : qu'est-ce que c'est que ce velléitaire du web ?).
Sur les Tasons, le Professeur Patrigeon Et Son Equipe évoquait le prix de l'Eurovision 1960, Tom Pilibi, chanté par Jacqueline Boyer. Perle vocale découverte grâce à François Morel, que j'écoute avec délice tous les vendredis matins à 8 h 55. François Morel déjà évoqué ici à l'occasion de la mort de Dubillard (on aura compris que j'aime bien quand tout se recoupe).
Et c'est alors qu'une question terriblement métaphysique submergea soudain ma pauvre cervelle. Il fallait, oui, que ma curiosité insatiable se satisfasse à l'instant : qui avait donc gagné l'Eurovision en 1962 ?
Réponse : Isabelle Aubret, avec Un premier amour.

























62 était une année vraiment prodigieuse. La France n'a regagné l'Eurovision qu'en 69, puis en 77, et depuis, ben, depuis...

mardi 17 janvier 2012

1962, année prodigieuse ?

"Blowin' in the Wind est une chanson de Bob Dylan, écrite en avril 1962, enregistrée le 9 juillet et parue sur l'album The Freewheelin' Bob Dylan. Archétype de la chanson de protestation, sa portée humaine et poétique en firent l'hymne d'une génération, et contribua à ériger son jeune auteur de 21 ans en porte-parole, en guide spirituel du mouvement des droits civiques.
La chanson, inspirée d'un air traditionnel des esclaves noirs à la mélodie très simple, est, à peine quelques jours plus tard, reprise sur les pelouses universitaires, par les étudiants, les chanteurs de folk. Le texte de la chanson paraît au mois de mai dans la sixième édition de Broadside Magazine, un journal de musique folk."

Extrait de Wat.tv.


1962, l'année prodigieuse, c'est le titre du livre de Bertrand Le Gendre que j'ai découvert samedi dernier à Leclerc Culture. Diable, voilà qui amène sacrément de l'eau à mon moulin. Impossible de passer à côté, il va m'en coûter vingt et un euros, mais comment ignorer un livre qui déclare (quatrième de couverture) "que 1962 a réinventé la France" et que même "L'air est plus léger. La France connaît alors une expansion économique miraculeuse, sans chômage ou presque. C'est ce moment charnière, décisif pour son avenir, que ce livre raconte. Sur le ton du reportage, il relate les événements heureux ou tragiques, futiles ou déterminants que les Français ont vécus voici cinquante ans. 1962 est une année prodigieuse, la plus glorieuse des « trente glorieuses ». 

L'auteur a même ouvert tout récemment un blog dédié à son livre, intitulé pareillement 1962, l'année prodigieuse. Bon, pour le moment, il n'y a qu'un article : une vidéo de Richard Anthony, Et j'entends siffler le train. Que j'ai déjà posté ici. Je suis curieux de ce qui va venir maintenant.

dimanche 15 janvier 2012

Mâcher

Je relis Le jeu verbal de Michel Bernardy, formidable livre d'un ancien professeur de langage au Conservatoire national supérieur d'art dramatique, auparavant pensionnaire de la Comédie-Française de 1960 à 1972. Sous-titré "Traité de diction française à l'usage de l'honnête homme", son propos, s'il s'adresse tout d'abord aux acteurs, n'en intéresse pas moins tout ceux qui sont amoureux de la langue française. Récemment, j'ai découvert que l'auteur avait un site, où l'on peut retrouver l'essentiel du livre (difficile à dénicher dans le commerce, heureusement une nouvelle édition vient de sortir aux éditions L'Age d'Homme).
Robin Renucci, qui fut son élève, dans sa préface vibrante d'admiration pour celui qu'il qualifie de poète et alchimiste, philosophe par le feu de la langue, écrit qu'il "ne se contente pas de sa science de lettré. Il convoque, pour soutenir sa démonstration, de grands maîtres de la scène. C'est pourquoi tout comédien peut puiser immédiatement, en ce beau livre, et trouver réponses concrètes aux problèmes sur lesquels il bute.
Ainsi peut-il saisir plus clairement cette "fécondation artificielle" dont parle Jouvet dans Le Comédien désincarné : "L'acteur mâche ses phrases et les incorpore à ses sentiments."(p. 11)"
Le travail de l'acteur s'apparente à une sorte de destruction créatrice, où la parole est comme  retournée, labourée, éprouvée longuement. Soumise à une force de pression, ruminée, ravinée, assimilée.

Je retrouve ce verbe mâcher dans Poème en miettes, le premier texte de Sauf, l'anthologie d'Antoine Emaz* publiée tout récemment chez Tarabuste, la maison d'édition sise à Saint-Benoît du Sault.

"Durer. Il faut une patience d'ange pour mâcher un mot, absorber complètement une couleur. Le plus souvent, on a lu, on a vu. Trop peu patients, occupés, devenus incapables de lourdeur, de lenteur vive, d'épaisseur."

Cette sorte d'oxymore, lenteur vive, me rend songeur. Il dit bien comment, malgré le temps qui nous est toujours compté, il convient de savoir l'oublier pour pousser plus loin le travail du sens. Ce qui paradoxalement est sans doute la plus rapide façon d'aller au cœur des choses.


Rédigé en écoutant January, du trio du pianiste polonais Marcin Wasilewski.





* D'Antoine Emaz, j'ai aimé aussi récemment Cuisine, titre bien inhabituel pour un poète, et il faut dire qu'il ne s'agit pas là de poèmes mais de carnets, écrits en marge de l'écriture poétique, et qui en montrent en quelque sorte ce qui se trame aux alentours, le travail en cours, la cuisine, la tambouille, d'où le titre, homologue à l'opus précédent, de même nature, Cambouis. Là-dessus, lire l'entretien avec Florence Trocmé, et la recension des deux livres par Jacques Josse.

mercredi 11 janvier 2012

Sibérie et rue Plumet

Lu Dans les forêts de Sibérie, de Sylvain Tesson (Gallimard, 2011). Récit autobiographique de son séjour de six mois en cabane, pas le Goulag non, mais une vraie isba de bois sur les rivages du lac Baïkal, à cinq jours de marche du premier village. Auparavant voyageur frénétique, Tesson cherche là à apprivoiser le temps dans l'immobilité d'un ermitage par moins trente degrés, entre taïga et banquise. Il lit énormément, des livres le plus possible sans rapport avec son domaine (Casanova par exemple), pêche l'omble, coupe du bois, se saoule régulièrement à la vodka (surtout quand il a la visite des rudes habitants du lac), écrit, arpente les sommets, nourrit les mésanges. Bref, un bon livre, bien écrit, bien intéressant.
Une seule réticence : je ne discute pas la sincérité de l'expérience, mais je m'interroge tout de même sur sa nature. Cet ermitage, d'emblée Tesson l'avait prévu de six mois, limité dans le temps, et il est clair que le projet d'en faire un livre était présent dès le départ. Et un film aussi, car il en a tiré aussi un film. Or, ce qui est surprenant c'est qu'il ne mentionne pas du tout cet aspect dans le livre. Le film n'a pas d'existence dans le journal tenu au quotidien. Comme s'il avait senti que cela aurait retiré de l'authenticité à son récit. On peut écrire pour soi, c'est concevable, mais il est improbable que l'on se filme seulement pour soi. Sylvain Tesson ne vit pas la pure expérience de l'ermitage, il la vit dans la visée de son exploitation ultérieure. Encore une fois je ne dis pas qu'il a fait tout cela pour sa publicité, s'enrichir, non, mais je trouve ça symptomatique de notre époque : même celui qui va se retirer sous les plus froides latitudes du globe, ressent le besoin quelques mois plus tard, voire dès le principe du projet, d'en référer au reste du monde, médiatisant sans délai son vivre de solitude.



Bon, revenons à nos moutons hugoliens. Car si je parle ici de tout cela, c'est aussi qu'il y a un rapport avec le grand Victor. Il se trouve donc que notre anachorète le cite à la date du 16 juillet, à la fin de son séjour, quand l'été a enfin pris ses quartiers sur le lac, avec ses ours et ses bataillons de moustiques :

Des fleurs d'églantier bordent le pied des arbres de la lisière du bois. Elles tournent leur corolle vers leur dieu le Soleil. Je pense à la description du jardin de la rue Plumet dans Les Misérables. Jean Valjean a laissé la friche pousser et Hugo file une profession de foi panthéiste : "Tout travaille à tout... Il y a entre les êtres et les choses des relations de prodige... Aucun penseur n'oserait dire que le parfum des aubépines est inutile aux constellations..."
  Prolonger la question hugolienne : qui prétendrait que le ressac n'est pour rien dans les rêves du faon, que le vent n'éprouve rien à se heurter au mur, que l'aube est insensible aux trilles des mésanges ?" (page 256)


jeudi 5 janvier 2012

3 janvier 1962

De Gaulle ouvre l'année. Suivent des reportages tout à fait intéressants sur le Mexique, la grève des mineurs à Decazeville, la lutte contre le bruit ou le nouvel an en Angleterre (où l'on aime à buffer comme des abrutis dans des cornes de chasse). J'enregistre tout ça avec Audacity, il y a des chances pour qu'on en retrouve des bribes cet été.





Mon petit frère Alain a 50 ans aujourd'hui. Bon anniversaire, frangin !

mercredi 4 janvier 2012

Bonne année 2012

2012. Nous y voilà. Dans cette cinquantième année après 1962. Cent cinquante ans après la parution des Misérables. Mais il y a fort à parier que ce ne sera pas Hugo qui tiendra la vedette sur le chapitre des commémorations. Le naufrage du Titanic (centenaire de la catastrophe ayant eu lieu dans la nuit du 14 au 15 avril 1912), la mort de Marilyn Monroe (le 5 août 1962) exciteront plus sûrement la presse magazine.




Marilyn faisait d'ailleurs la une de la Nouvelle République, quelques jours avant la grande première des Misérables à Cluis. C'est un événement dont j'imagine qu'on a dû discuter entre comédiens, aussi est-il évoqué (brièvement) dans la pièce.
En ce qui concerne celle-ci, bonnes nouvelles : mail sympa de Colin (ex-Robin Hood, ex-Quincey Morris...), m'assurant de sa motivation et de sa disponibilité cet été (ainsi que frère, copine et soeur de la copine...), autre mail tout aussi sympa de Francis (ex-Petit-Jean, ex-Martin Guerre...) m'informant de sa participation (il sera donc Jean Valjean, ce dont je me réjouis extrêmement).
Merci aussi à Chantal, ma nouvelle collègue, qui vient de me prêter une ancienne BD de René Giffey sur Les Misérables. Il s'agit de la réédition aux éditions Transit, en 1979, de la série parue à l'origine dans l'hebdomadaire TARZAN du n°1 (19 septembre 1946) au n°140 (29 mai 1949).
Ce René Giffey (que je ne connaissais pas du tout) travaillait, semble-t-il, comme un damné, et c'est d'épuisement qu'il serait mort à Arcachon en 1965. Il est amusant de voir qu'à côté des grands classiques de la littérature, des titres de littérature jeunesse et des séries comme Buffalo Bill, il a aussi illustré des ouvrages érotiques et même sadomasochistes.

Marylin, Giffey, ça commence chaudement, cette année 2012.